MOI CULTUREL
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La fascination unique que la Chine semble exercer sur tous ceux qui l'abordent pourrait en un sens se comparer à l'attraction qui rapproche les sexes: elle suscite en effet toute une luxuriante imagerie qui suggère une romanesque touffeur de magie et de mystère, mais elle repose en fait sur une réalité élémentaire — du point de vue occidental, la Chine est tout simplement l'autre pôle de l'expérience humaine.
Toutes les autres grandes civilisations sont soit mortes (Égypte, Mésopotamie, Amérique précolombienne), ou trop exclusivement absorbées par les problèmes de survie dans des conditions extrêmes (cultures primitives), ou trop proches de nous (cultures islamiques, Inde) pour pouvoir offrir un contraste aussi total, une altérité aussi complète, une originalité aussi radicale et éclairante que la Chine.
C'est seulement quand nous considérons la Chine que nous pouvons enfin prendre une plus exacte mesure de notre propre identité et que nous commençons à percevoir quelle part de notre héritage relève de l'humanité universelle, et quelle part ne fait que refléter de simples idiosyncrasies indo-européennes.
La Chine est cet Autre fondamental sans la rencontre duquel l'Occident ne saurait devenir vraiment conscient des contours et des limites de son Moi culturel.
Simon Leys 1987. L’exotisme de Segalen
In l’humeur, l’honneur, l’horreur, essai sur la culture et la politique chinoise, 1991
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